Une chronique de Jean-Benoît Nadeau dans Le Devoir.
Il était une fois une langue ridicule, parlée dans un recoin obscur de l’empire et que personne ne voulait apprendre : il s’agit évidemment de l’anglais — dont l’histoire comporte une série de leçons utiles pour les francophones, en particulier pour les Québécois.
Car qui parlait l’anglais, il y a mille ans ? Personne. Même les Anglais avaient du mal à se convaincre de son intérêt. L’Angleterre était alors une possession française, ou plus exactement normande, après la très humiliante défaite de la bataille d’Hastings. Elle restera sous domination française pendant près de trois siècles.
C’est peu dire que l’anglais était une langue menacée. Certes, le peuple s’obstinait à le parler, mais quel anglais ? Si vous parcourez n’importe quelle page de l’Oxford English Dictionary, vous constaterez que la moitié du vocabulaire anglais de base est d’origine française. Des termes aussi anglais que pedigree, pudding, catch, chase, staunch, esquire, haggis et surf ne sont que du français mal prononcé.
Mais à partir du XIIIe siècle, deux guerres de Cent Ans — pas une, deux — ont amené l’élite anglaise — qui n’était anglaise que de nom — à reconsidérer sa loyauté à la Couronne française. (…)