Une interview de Jean-Benoît Nadeau dans L’actualité.

Marie-José Nadeau Photo: Conseil mondial de l'énergie

Marie-José Nadeau
Photo: Conseil mondial de l’énergie

Marie-José Nadeau, ancienne vice-présidente à Hydro-Québec, est présidente du conseil d’administration du Conseil mondial de l’énergie depuis 2013. Cet organisme très influent, fondé en 1923 à Londres, réunit près de 3 000 entreprises, instituts de recherche et gouvernements de 99 pays, qui étudient les grands enjeux énergétiques de la planète pour toutes les formes d’énergie. L’actualité l’a rencontrée à son bureau de la Place Ville-Marie pour connaître sa vision d’un secteur en plein bouleversement.

Quelles sont vos attentes quant à la conférence de Paris?

Je pense que la COP21 aura accompli un grand pas si les différents pays adoptent un objectif national de réduction des gaz à effet de serre (GES) et s’ils respectent leurs engagements. Les modèles actuels ne répondent pas au défi. Il faudrait pouvoir limiter la hausse mondiale des températures à 2 °C. Au rythme où vont les choses, ce sera plutôt une hausse de 4,5 °C, voire 5 °C. On ne peut pas continuer comme si de rien n’était.

Mais advenant que les pays participants ne parviennent pas à s’entendre sur une formule commune, je serais déçue, personnellement et en tant que présidente du Conseil mondial de l’énergie, que l’on parle d’échec à Paris. Il faut être plus nuancé.

Pourquoi?

Parce qu’il est très difficile pour des pays aussi divers que la Chine, le Canada, la France, les États-Unis ou la Suisse de s’entendre sur une même formule, avec le même objectif, le même type d’engagement. Les Chinois sont très jaloux de leur autonomie et ne veulent pas de formule contraignante. Les Américains non plus. Il existe plusieurs mécanismes de tarification du carbone: taxe directe, quotas, droits d’émissions, bourse du carbone. Chacun a ses avantages et ses inconvénients.

Tant mieux si on peut établir une formule unique mondiale, mais il est plus réaliste de s’attendre à ce que chaque pays adopte la formule qui lui convient. Par exemple, les Chinois avancent très vite dans l’établissement d’un système de tarification du carbone — en fait, ils ont sept systèmes distincts. Ils le font pour des raisons qui sont les leurs, notamment pour réduire la pollution, mais ils agissent nettement plus vite que les Américains. Le danger, c’est d’essayer d’avoir un système unique mondial, «de la Molson pour tout le monde», comme on dit. Il faut se concentrer sur l’objectif premier qui n’est pas le mécanisme, mais le résultat visé: la réduction des émissions de GES.

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